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Va donc, hey !... Tabernak...
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17 septembre 2008

Art contemporain : "Re-Callée"

Au Québec, l'heure est aux choix décisifs pour le bien-être du pays : tout le monde s'apprête à déposer son bulletin pour son représentant à l'assemblée préféré. Montréal se couvre d'affiches de propagande, enfin de réclame comme on dit par icitte. Le nombre de candidats par quartier est impressionnant. Autant de feuilles mortes qui tomberont des poteaux avant la fin de l'automne... Les poulains commencent à faire campagne; le parti libéral a établi son QG à deux pas de chez moi, sur la même rue (beûrk), et hier soir, en rentrant les bras chargés de victuailles pour l'apéro prévu en famille, j'ai croisé le dernier des Mohicans venu conquérir l'Italie, un jeune bourgeois dénommé Trudeau comme l'aéroport, de type énarque (eh oui, ce genre de têtes à claques existe aussi de ce côté du monde, c'est bien de la misère), les cheveux rejetés crânement en arrière, petit costume de tweed, pas de cravate car faut bien jouer la décontract'titude, flanqué de son collaborateur, autant dire de son clône. Il sortait à peine de leur bureau pour aller serrer des mains sur le marché Jean Talon, que, pressé de se faire remarquer, dans l'enthousiasme (ou la rapacité) de la jeunesse inexpérimentée, le voilà qui se jette sans crier gare sur la première vieille dame qu'il rencontre, et lui secoue vigoureusement les pognes. La vieille fait un bond farouche vers l'arrière; mais le blondin, fier de sa prise, tient à son (vieil) os et ne le lâcherait sous aucun prétexte ! et la pauvre grand-mère de lutter pour se dégager en essayant de feinter l'ennemi par des sourires diplomates ! Après quelques secondes de ce manège comique, elle réussit enfin à reprendre ses mains, avec tous ses doigts (à cet âge, c'est fragile), et s'éloigna en se les frottant, de douleur ou par peur des microbes... Cette petite scène de rue pittoresque me mit en joie : pour une première sortie dans un patelin où tu comptes ramasser un maximum de suffrages, on ne pouvait rêver mieux ! Pas prêt de se faire élire, s'il continue à effrayer aux mamies...

Tout ceci pour dire que, comme au moment du vote il faut bien réfléchir au nom qu'on met dans l'urne (je suis sûre que vous me comprenez, amis de France...), de même j'ai réfléchi au thème que je vais aborder aujourd'hui (oui, le message du jour n'a pas encore commencé, vous aviez pas remarqué ??), et c'est la mort dans l'âme que je renonce pour l'instant à vous parler de ce qui me brûle les phalanges depuis samedi soir, mais ce n'est que pour mieux vous le faire apprécier plus tard, quand j'aurai plus de temps et de sérénité, car en ce moment c'est tempête sous un crâne.

Je vous parlerai donc du deuxième événement en date, rompant avec audace l'ordre chronologique et naturel de ce blog (mais est-ce seulement la première fois ?), c'est-à-dire de l'expo, immigrée elle aussi, de Sophie Calle qui a tourné à Paris à la BNF et à Beaubourg, si je ne me trompe. Tout d'abord, elle fut un prétexte pour traverser le Vieux-Montréal que je n'avais pas encore revu depuis mon arrivée: plongée dans la topographie du souvenir... et vague écho de Paris... L'expo se tient en ce moment à la Fondation pour l'Art Contemporain, rue Saint-Jean; elle est sur deux bâtiments, qui se font face ou presque. La première partie est très "textuelle" : on lit essentiellement les explications plus ou moins alambiquées d'une centaine de femmes réagissant à un courriel de rupture (même pas une lettre, le goujat !) reçu par l'artiste. On le devine, le rapport au média est ici fondamental, et c'est d'ailleurs dans le cadre du séminaire sur l'intermédialité que j'ai fait cette visite. Je ne suis pas tombée loin, dans le message que j'ai pondu là-dessus précédemment. Le propos du mail est clair, et pourtant tellement contourné, rhétorique, plein d'émotions, de doutes, de peurs refoulées... Les exégèses permettent de comprendre, en 107 fois au cours de l'exposition, ce qui reste de cette lecture, de l'autre côté de l'écran. Plusieurs "commentaires" l'expriment très bien : deux dessins, l'un montrant l'homme qui écrit, entouré de tout un tas de dicos, grammaires, bescherelles, précis de vocabulaire, cliquant d'un air soulagé sur le bouton "Envoyer"; l'autre, sur fond noir, représentant la femme qui lit ce mail sur son ordinateur, le visage attéré; il y a comme des ondes blanches devant l'écran, quelques arcs de cercle très pâles, comme pour matérialiser ce résidu amoindri d'émotions captées mais dévitalisées, passées au filtre et réinterprétées selon les connaissances et l'humeur de la destinataire; ou encore, une étude précise de l'impact du support du texte (un palm) sur la lecture, qui montre de façon étonnante le lien vicié que les nouvelles technologies créent avec les textes : coupures, décalages, parasitage sonore, etc. Le reste des "oeuvres" tournent surtout autour de la lâcheté, de l'égoïsme, de la fausseté (opinions surtout provoquées par le moyen emprunté encore une fois, c'est-à-dire la lettre, au lieu d'un explication face-à-face, et même le courriel, avec le risque plus élevé de perte irrémédiable qu'il comporte) ou au contraire du courage et de l'amour sincère de cet homme inconnu. C'est quand même un macho dans l'esprit de la plupart des commentatrices ! Au point que l'expo prend des airs de procès pour la défense des droits des femmes (d'ailleurs, il y a les avis d'une avocate, d'une défenseuse de ces droits, d'une juge, d'une commissaire, d'une détenue, l'une des plus modérées à l'égard de l'homme !, d'une journaliste...), où on voudrait convaincre de crime l'absent et ériger la victime au rang de gloire nationale. C'est parfois un peu agaçant (surtout pour les mecs, n'est-ce pas, papa ?). Seules quelques femmes ne sont pas tombées dans la diabolisation : la journaliste, pour qui le fait divers ne fait pas sensation, une petite fille de 12 ans (son mot est émouvant, simple et bien vu), et, surprise, Christine Angot ! pour qui ce chorus contre le mâle s'apparente au "choeur de la mort" (attention, sortez les trompettes). La deuxième salle présentait des enregistrements vidéo et des photos, pour les arts plus visuels; tous font de la femme la "mulier dolorosa" abandonnée à son triste sort, tiraillée entre l'incompréhension et la colère. On finit par se dire que c'est sûrement la réaction la plus courante, ou du moins la mieux acceptée...

Une expo polémique donc. Il faut que j'y retourne, pour mieux voir le deuxième espace que j'ai un peu bâclé, pour cause de fermeture. Et pour me faire une opinion moins im-médiate...    

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Commentaires
C
Je voulais partager ma réflexion sur l'exposition de Sophie Calle.<br /> Je ne parlais pas de toi, Tatiana. Je sais bien que tu es une femme qui aime les hommes qui aiment les femmes.<br /> <br /> (Oh!? Mais qui a dit ça!?)
T
Oui, l'expo Sophie Calle a eu un grand succès en France, pas étonnant qu'elle te dise qqchose Christophe ! Et rassure-toi, il n'y pas de message subliminal de derrière les fagots, ce récit n'est responsable que de lui-même, et il parle bêtement et naïvement comme il pense (n'est-ce pas Syd ?) Je ne mène pas de combat féministe (pouah !), encore moins de croisade anti-hommes (manquerait plus que ça !), et l'expo ne risque pas de me faire changer d'avis. <br /> <br /> Apparemment, il y une manif contre Trudeau mercredi prochain, qui se joint à moi ?? Tous ensemble, tous en choeur !!!
J
C'est marrant, la grand'messe politique, ses liturgies particulières, (dont la scène de "Hand Shaking"), et puis l'expo que tu racontes me semblent renvoyer toutes deux à la rhétorique.<br /> <br /> Je m'explique : d'un discours ne révélant pas immédiatement les véritables enjeux extra-discursifs : le désir d'être élu, et celui, peut-être tout simple, de faire une expo remarquée et remarquable, avec un minimum de "grenouillage" à la clé.<br /> <br /> Ton récit me donne envie de découvrir la politique canado-québecquoise, où mes lacunes sont nombreuses...<br /> <br /> Peut-être le début d'une réorientation vers Sciences-Po!<br /> <br /> Bises.
C
Cette expo de Sophie Calle me dit quelque chose.<br /> Je suis en train de me dire que cette expo est caractéristique de notre époque:<br /> - Le réglement de compte en public, qui est une forme de manipulation, il me semble;<br /> - L'usage d'internet, qui déclenche les malentendus par l'emploi des mauvais mots (ce qui expliquerait la présence de tous ces bouquins de Français sur le dessin), et qui peut se montrer irrespectueux à cause de sa facilité d'utilisation<br /> - L'entretien de la guerre hommes/femmes: les femmes continuent de se croire persécutées par les hommes, et elles se serrent les coudes contre hommes;<br /> <br /> C'est quoi ce dont tu veux nous parler POUR DE VRAI?
A
Bonjour princesse ! Désolé de te harceler. C'est seulement pour mieux t'éclairer au sujet de notre bagage culturel inter-atlantique :<br /> PQ≠BQ ≈ Fr / PQ ± BQ ... Enfin bref, les politiques tous les mêmes. Tu n'as qu'à "cliquer" sur ma signature pour t'en apercevoir. A + !
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